(CRP/Syfia) A Ewo, dans le département de la Cuvette-Ouest, les femmes connaissent leurs devoirs, mais certaines ne les pratiquent qu’à moitié. En cause, le comportement des maris. Un débat communautaire a récemment été organisé sur ce thème.
A Ewo (Cuvette-Ouest), les femmes accomplissent dans l’ensemble bien leurs devoirs au foyer. Elles l’ont affirmé en novembre dernier, lors d’un débat communautaire à la Mairie. «Je prends mon mari comme un bébé. Quand il rentre à la maison, je le reçois et je lui enlève la veste. Je lui dépose de l’eau à la douche. On mange ensemble et il y a des moments où je le fais même manger ! », a témoigné Francine Nzila, secrétaire adjointe de l’Association de développement communautaire de la Cuvette-Ouest (ADECOCO).
Ce débat était animé en lingala par Nathalie Ngatsongo et Alain Michel Otieli, journalistes du projet «Journalistes, associations et autorités locales contribuent à un meilleur respect des droits des femmes rurales pour lutter contrer la pauvreté », sous la supervision de Gaston Elbi Enkari, coordonnateur dudit projet, piloté par le CRP, en partenariat avec Syfia international. Un projet financé par l’Union européenne.
Des associations des femmes d’Ewo et des villages environnants, des chefs de quartier, la directrice départementale de la Promotion de la femme ont, entre autres, participé à ce débat. Au total, 47 personnes étaient présentes. Angélique Kebi, présidente du groupement Wémé-yi (Tu es venu de toi même), a estimé que la femme devait « prendre soin de son mari, savoir cuisinier, repasser ses habits, prendre un pot ensemble le week-end, etc. »
S’accorder avant de se marier
Si certaines femmes accomplissent leurs devoirs, à Ewo, d’autres ont plus de mal à le faire. Pour Hortense Apelé, c’est le comportement de son époux qui la décourage : « Mon mari sort à tout moment et il rentre tard. C’est grâce à l’agriculture que nous élevons nos enfants, mais quand il me laisse travailler seule, je ne peux pas faire 10 sillons. Mon cœur n’est pas tranquille. Il me pousse à le chamailler. Du coup, parfois, je ne lave pas ses habits…»
Joseph Leboro, chef du quartier Kanga Mitema, marié depuis 1960, a reconnu le difficile quotidien des femmes : « Elles quittent les maisons à 4h du matin pour aller aux champs et reviennent à 19h. Fatiguées, elles ne peuvent plus accomplir tous leurs devoirs. Mais si les deux conjoints s’aiment et se respectent, il n’y a pas de déséquilibre. » Certains hommes présents au débat restent toutefois très exigeants, comme Jean Paul Ossolo, chef de village Ngaï (15 km d’Ewo) : « Je suis père de huit enfants. Ma femme s’occupe bien de moi, mais elle ne lave pas mes habits.»
Les discussions ont mis en lumière certaines mésententes. Aimé Kessakatira, chef de quartier Ewo village, a estimé qu’avant, seule la mort séparait les conjoints. Aujourd’hui, toujours selon lui, le divorce intervient à tout moment : « Sur 100 couples, il n’y a que 30 qui manifestent l’amour dans leur foyer. La majorité des femmes sont guidées par l’argent. Si tu n’en as pas, elles ne te respectent pas. A Ewo, les travailleurs ne vivent l’amour dans leur foyer qu’au moment de la paye. Quand l’argent est fini, il n’y a plus l’amour… »
Les participants au débat ont rappelé qu’avant de se marier, il était nécessaire de s’accorder sur des principes. Pour Daniel Ndougnam du groupement Abiél-Adzi, le mariage n’est pas une blague. Avant de s’engager, pendant les fiançailles, les deux partenaires doivent partager les secrets ou les opinions l’un à l’autre. Quand ils vivront ensuite sous le même toit, ils appliqueront cela pour éviter les disputes.
Angélique Onounga, directrice départementale de la Promotion de la femme, a exhorté les femmes à agir ainsi : « Nous devons nous donner les principes avant le mariage, puis marcher à deux avec ces principes. C’est cette éducation que nous devons donner à nos enfants. »
Jean Thibaut Ngoyi
Janvier 2016