(CRP/Syfia) Souvent battue par son époux, Martine Kengué a divorcé il y a 14 ans. Aujourd’hui chef de quartier à Komono (département de la Lékoumou), elle défend les droits des femmes et les encourage à s’émanciper.
« Mon mari n’a pas voulu me soutenir à l’école sous prétexte que quand je réussirai dans ma vie, je le quitterai. J’ai connu cinq maternités en 17 ans… On se battait tous les jours. Lorsque j’ai constaté que ça ne marchait plus entre nous, j’ai décidé de le quitter… C’était il y a 14 ans. Depuis, je m’occupe seule de mes cinq enfants », raconte Martine Kengué, aujourd’hui dans la cinquantaine.
Grande de taille, de teint clair, depuis deux ans maintenant, Martine dirige le comité du quartier centre-ville de Komono (une localité de 14 600 habitants environ, à 65 km au nord-ouest de Sibiti). Un de ses buts est de défendre les femmes qui ne connaissent pas leurs droits, en réalisant des sensibilisations, des médiations, etc.
Être privée de ses droits, Augustine Ayama sait ce que cela représente… La présidente de l’Association les femmes de Lissengué (un des six quartiers de Komono) (AFL), a en effet elle aussi été victime d’abus d’autorité de la part de son défunt mari. « J’avais fourni un dossier pour être recrutée au district de Komono. Malheureusement, mon époux avait alors interdit au Préfet de prendre mon dossier... Une autre fois, on m’a sollicitée pour intégrer la force publique, mais, là aussi, mon mari s’est à nouveau opposé, me privant d’exercer un métier quelconque. » Augustine a toutefois gardé sa langue dans sa poche : « Je n’ai pas voulu divorcer, car j’ai eu des enfants avec lui. Pour moi, partir, c’était mettre leurs vies en danger. Aujourd’hui, mes enfants sont grands et me soutiennent. »
« La femme n’est pas une esclave ! »
Albert Ngouaka, directeur de cabinet du maire de Komono, apprécie le courage de ces femmes. Il salue en particulier la libre-parole de Martine Kengué : « La femme n’est pas une esclave ! Elle doit s’exprimer. Il faut informer les Komonoises (habitantes de Komono) sur leurs droits pour qu’elles en prennent conscience. En nommant Martine Kengué chef de quartier, c’est déjà un premier pas ! »
De son côté, Felix Magellan Tsiba, ancien chef de quartier Makelé à Komono, voit en Martine « une femme de caractère, qui n’a pas hésité à dénoncer les maltraitances qu’elle a vécues dans le foyer de son ex-époux en présence de son nouveau compagnon lors d’un débat communautaire tenu en juin dernier avec les journalistes du Centre de Ressources pour la Presse (CRP).»
Martine Kengué est aussi admirée et écoutée par ses administrés. « Cette femme courageuse règle beaucoup de problèmes, notamment par des médiations », apprécie Léa Mbou, une habitante du quartier centre-ville de Komono. Sur certaines choses, en tout cas, Martine ne transigera pas : « Les femmes ont le droit de travailler. Avec leurs salaires, elles peuvent soutenir les enfants. Elles ont le droit d’être honorées par leurs époux. Les femmes du district de Komono doivent comprendre cette logique. »
Jean Thibaut Ngoyi
Juillet 2016