(CRP/Syfia) A Ignié, dans le département du Pool, à environ 45 km de Brazzaville des femmes élèvent des poules croisées afin d’améliorer la race locale. Une activité certes difficile mais les permet à arrondir les fins du mois.
"Il y a deux ans environ, j'ai commencé à m'intéresser à l’élevage de poules, persuadée qu'il y avait là de grandes opportunités d’affaires, surtout au moment des fêtes. En fin d'année dernière, j'ai vendu une dizaine de poules pour un bénéfice de 45 000 Fcfa (70 €). Une recette placée sur le compte de mon fils qui prépare son Bac à Brazzaville", se félicite Claudia Mboui. Dans la trentaine, Claudia est mère de cinq enfants. Elle fait partie des femmes du district d’Ignié qui pratiquent cet élevage dans le département du Pool, sur la nationale n°2, à environ 45 km au nord de Brazzaville. Leurs poules de race locale, dites "Batéké", car originaires du haut plateau du même nom, couvent des oeufs en provenance d'Europe de "poules pondeuses" ou élèvent des poussins de la même origine. Les poules ainsi "croisées" de Claudia peuvent produire 15 à 20 œufs par cycle, alors que la poule 100 % locale arrive rarement à 10 œufs.
Initié par son mari, cet élevage permet actuellement à Claudia de subvenir à ses besoins : "De plus, quand nous n'avons rien à la maison, nous prenons une poule et en faisons notre repas." Claudia explique encore qu'elle avait une soixantaine de poules avant les fêtes de fin d’année 2014. Elle n'en a plus aujourd’hui qu’une trentaine. Si cette activité est particulièrement rentable au moment des fêtes de fin d'année, Claudia précise qu'elle "exige un suivi quotidien. Vous devez être prêt à y consacrer tout le temps nécessaire. Quelquefois, vous avez même besoin du concours de toute la main d’œuvre familiale pour nettoyer, soigner, vérifier le poids, etc."
Rose Montsiba élève, elle, des poules depuis 2012. Veuve et mère de six enfants, elle compte aujourd'hui pas moins de 200 de ces animaux. "Cette activité n’est pas facile. En plus des problèmes financiers, je suis ennuyée par des chiens qui attaquent les poules. Mon enclos a déjà été endommagé." Si Rose tient malgré tout le coup, c'est aussi parce qu'elle est persuadée de la qualité des produits de son élevage : "Nos poules locales ainsi 'croisées' avec d'autres variétés ont une texture plus douce et un poids plus élevé. Surtout quand elles sont bien entretenues", vante Rose, dont la clientèle est majoritairement ouest-africaine et vivant à Brazzaville. Rien à voir, selon elle, avec les poules congelées, surgelées, qu’on trouve ça et là dans les commerces.
Fragiles protégées
Rose et Claudia vendent leurs poules entre 2 500 et 5 000 Fcfa (entre 4 et 8 €). Pour ces éleveuses, l’alimentation représente tout de même un investissement : "60 à 75 % du coût de production de cette espèce." Claudia, par exemple, achète chaque mois trois sacs de 50 kg d’aliments à hauteur de 10 000 Fcfa (15 €) le sac. Un sacrifice indispensable, souligne Rose : "Le manque d'aliments peut entrainer la mort de certaines bêtes."
Jules Tsiba, le mari de Claudia, précise : "Au fur et à mesure que la poule grandit, sa consommation alimentaire augmente rapidement. Nos poules sont plus exigeantes que les poules 100 % locales qui peuvent se débrouiller seules pour se nourrir et se protéger contre les intempéries." Les éleveuses sont donc aux petits soins avec leurs fragiles protégées. "Nettoyage régulier de la ferme, contrôle du poids et de la croissance sont autant d'exigences journalières que l’éleveur doit strictement respecter afin d’avoir des animaux en bonne santé, fait savoir Claudia. Elle poursuit, pour que les poules soient épanouies, il leur faut aussi un minimum d’espace, ainsi qu'un local avec une grande fenêtre grillagée pour l’aération."
Quatre femmes se sont pour le moment lancées dans cet élevage à Ignié. Pour René Ndolo, exploitant agricole du groupement Protacom, basé lui aussi sur le site d’Agri-Congo, "plus elles seront nombreuses à pratiquer cet élevage et plus elles développeront cette activité." Non loin de là, les autorités ont déjà érigé des villages agricoles dans lesquels on élève aussi des poules pondeuses.
Annette Kouamba Matondo
Février 2015