(CRP/Syfia) Souvent victimes de différentes violences, bon nombre de femmes ne savent pas ce que dit la loi. Un débat communautaire a été organisé à ce sujet au Centre de Ressources pour la Presse de Brazzaville.
"Les violences à l’égard de la femme, que dit la loi ?" Tel a été le thème débattu le 19 avril dernier au Centre de Ressources pour la Presse (CRP) entre journalistes, associations et citoyennes. Ce débat était en quelque sorte un prélude au lancement du projet "Journalistes, associations et autorités locales contribuent à un meilleur respect des droits des femmes rurales pour lutter contre la pauvreté ", financé par l’Union européenne et piloté par le CRP, en partenariat avec Syfia International.
Prenant la parole au cours de ce débat communautaire animé par Gaston Elbi Enkari, secrétaire général du CRP et coordonnateur du projet, assisté par Jean Thibaut Ngoyi et Annette Kouamba Matondo, le secrétaire permanent du Comptoir juridique junior (CJJ), Lilian Barros, a fait savoir qu’il existe plusieurs catégories de violences faites à la femme : violences physiques, sexuelles, domestiques, morales, économiques, etc. Pour le secrétaire permanent du CJJ, les violences sexuelles se manifestent notamment dans la société par le harcèlement en milieu scolaire. Le CJJ et "Dynamique pluriel", une association féminine de Brazzaville, au cours d’un projet que ces deux OSC ont piloté entre 2012 et 2013 grâce à un financement du Programme concerté pluri-acteurs (PCPA Congo), ont relevé que sur environ 800 élèves filles de trois lycées congolais (Brazzaville : lycées Savorgnan De Brazza et Thomas Sankara ; Pointe-Noire : lycée Poaty Bernard), près de 450 (plus de la moitié d’entre elles !), étaient harcelées sexuellement par leurs enseignants.
10 à 30 ans de prison
Au CRP, au cours du débat communautaire, Lilian Barros a également relevé que toutes ces violences sont punies selon le Code pénal. Par exemple, ses articles 332 et 333 sanctionnent le viol d’une peine de 10 à 30 ans de prison et d’une amende allant jusqu'à 1 million de Fcfa (1 500 €). Le secrétaire permanent du CJJ a ajouté que sa structure forme des femmes para-juristes victimes de violences et de toutes sortes d’abus, quelque soit leur niveau d’instruction. Citant, à titre d’exemple, le cas de l’une d’entre elles originaire de Ouesso (département de la Sangha, au nord du Congo) : "Elle a fait comprendre à son mari que s’il la battait à nouveau, il serait poursuivi en justice. Aujourd’hui, ce dernier, conscient des conséquences, n’a plus le même comportement."
De son coté, Joëlle Emmanuelle Akouélé, présidente de la Coopérative des femmes handicapées du Congo, a expliqué que les personnes qu’elle défend sont, au quotidien, stigmatisées. Des discriminations qui l’ont poussée à créer son association. Pour sa part, intervenant dans ce même débat sur la question de savoir si le viol est reconnu dans le couple, la secrétaire générale adjointe du Mouvement des mères pour la paix, la solidarité et le développement, Angélique Ntinou, a affirmé que "selon notre tradition, la femme n’a pas de droits sur son corps. Celui-ci appartient à son mari. Le viol n’existe donc pas…" Lilian Barros est alors à nouveau intervenu pour rappeler que la loi ne dit pas la même chose. "Tous les citoyens sont égaux devant la loi (…) La femme a les mêmes droits que l’homme (…)", citant l’article 8 de la Constitution de 2002.
"Combat commun"
Ce qui a fait réagir la présidente de la Communauté nationale des droits des femmes, Germaine Nguenoni Onanga : "Nous devons travailler ensemble, car nous menons un combat commun pour le respect des droits humains, l’autonomisation des femmes et des peuples autochtones, afin que ces derniers puissent s’intégrer dans la société." Une lutte que partage le président du Réseau national des populations autochtones du Congo, Etienne Tang-Tang. Celui-ci a déploré le manque de textes d’application sur la loi du 25 février 2011, portant promotion et protection des droits des populations autochtones. Il a, lui aussi, insisté sur le sort de ces femmes, parfois violées par des Bantous ou d’autres autochtones.
Flore Michèle Makoumbou
Juin 2014